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Le piano ou l’instrument orchestre, ses capacités polyphoniques, exemples de morceaux
On va voir comment le piano, grâce à ses caractéristiques et sa polyphonie, peut jouer comme plusieurs instruments, et même devenir un véritable orchestre à lui tout seul.
Dans cet article, nous verrons d’abord les aspects et les caractéristiques de la polyphonie du piano.
Puis, nous partirons pour un voyage à travers les époques avec des exemples de morceaux qui mettent en avant les possibilités sonores du piano. La plupart de ces morceaux ont aussi marqué le piano et l’évolution des styles, certains sont devenus cultes et toujours très joués aujourd’hui.
Retrouvez sur cette page d’autres conseils sur l’apprentissage et des méthodes pour apprendre le piano
Tout d’abord, qu’est-ce que la polyphonie ?
Un instrument polyphonique peut faire entendre plusieurs sons en même temps. C’est donc le cas du piano mais aussi d’autres instruments comme la guitare, la harpe.
La polyphonie au piano permet de :
- jouer plusieurs notes en même temps : par exemple un accord de 3 ou 4 notes plaquées illustre cette polyphonie. On entend 1 harmonie, c’est à dire une combinaison de plusieurs sons.
- faire entendre plusieurs voix, à minima 2 voix, par exemple un accompagnement et une mélodie. L’écriture sur deux portées (le plus souvent clé de Fa et clé de Sol) amène régulièrement à superposer l’accompagnement (main gauche) et la mélodie (main droite). Souvent d’ailleurs, à la manière d’un soliste, la mélodie sera au premier plan sonore quand l’accompagnement sera plus en retrait, sur un second plan.
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De là découle de grandes possibilités sonores :
- jouer un morceau comme s’il y avait plusieurs instruments : 2 ou 3 voix, jusqu’à plusieurs pupitres, ce qui donne l’impression que le piano devient un ensemble d’instruments.
- le piano dispose d’une large palette de sons. Les 88 touches du piano couvrent 7 octaves (de la note Do à Si). Le piano peut donc jouer dans différentes tessitures de l’extrême grave à l’extrême aigu.
- la pédale forte permet de faire tenir une ou plusieurs notes. Elle fait aussi raisonner d’autres notes/cordes (qui ne sont pas jouées). Ainsi, cette pédale enrichit le son et lui donne plus de puissance.
La polyphonie : quand le piano imite plusieurs instruments et un orchestre à lui seul
Grâce à la polyphonie, les pianistes ont la possibilité de faire se superposer des harmonies complexes pour jouer des accords par exemple ou faire entendre plusieurs voix.
Caractéristiques de la polyphonie au piano
La polyphonie est donc une propriété naturelle du piano, qui en fait un instrument riche et polyvalent sur le plan musical.
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Voyons plusieurs caractéristiques de cette polyphonie :
- Indépendance des voix : chaque ligne musicale peut avoir son propre rythme et sa propre mélodie. Les lignes musicales deviennent alors indépendantes.
- Texture musicale : la polyphonie créée une certaine atmosphère sonore qui peut être à la fois dense et harmonieuse. Elle est souvent utilisée pour enrichir les compositions.
- Contrepoint : le contrepoint découle de la polyphonie. C’est l’art de faire se superposer les lignes musicales de façon organisée. Le maître en la matière et un précurseur est Jean-Sébastien Bach.
- Interaction entre les mains : au piano, cela implique souvent que la main gauche joue une ligne indépendante de la main droite. Par exemple, des accords ou une basse à la main gauche, quand la main droite jouera une ligne mélodique.
- Les pédales : l’utilisation judicieuse des pédales permet de créer des effets de résonance et de sustain (grâce à la pédale Forte), ce qui donne plus de profondeur au son et plus de volume, rapprochant le piano d’un ensemble orchestral (toute proportion gardée !).
- Dynamiques et nuances : les nuances ajoutent de l’amplitude à la polyphonie. Un crescendo vers un Fortissimo, et le son prend de l’épaisseur, comme une explosion sonore de plusieurs instruments. A l’opposé, un decrescendo vers des nuances Pianos amène des sons plus délicats et retenus, comme le murmure d’un pupitre de violons ou d’instruments à vent.
- Les intentions sonores pour imiter certains instruments : le jeu staccato peut rappeler les pizzicatos de violons ou de violoncelles. Une phrase legato pour imiter la mélodie de clarinettes ou de hautbois. Des notes graves plaquées, pédale forte enfoncée, peut donner l’impression d’un basson ou d’une contrebasse.
Exemple d’œuvres utilisant la polyphonie, et transcription orchestrale
Partons à présent à la découverte de morceaux qui montrent les capacités sonores du piano et qui font à la fois l’éloge de tout un répertoire. C’est le moment de régaler nos oreilles 🙂
Les inventions et les fugues de Bach
A tout seigneur tout honneur ! C’est à l’aire du baroque et de Bach que la polyphonie gagne ses lettres de noblesse. Deux éléments ont été moteurs :
- la conception de l’instrument : le clavecin de l’époque permet de pincer plusieurs cordes à la fois. On rappelle que les claviers sont des instruments à cordes, cordes qui sont actionnées de manière mécanique quand nos doigts enfoncent les touches. Le clavier évoluera vers le piano-forte (cordes frappées), puis le piano moderne que nous connaissons.
- l’élaboration d’une écriture musicale au service de la polyphonie.
Selon Bach, l’objectif des Inventions est double : s’exercer à la polyphonie à 2 ou 3 voix et apprendre le jeu cantabile (chantant).
Voici une magnifique fugue de Jean-Sébastien Bach qui illustre le contrepoint et le jeu à plusieurs voix qui tantôt se mêlent, se superposent, ou se répondent.
Les variations Goldberg
L’oeuvre toute entière des variations Goldberg, BWV 988, toujours de J.S. Bach contient de nombreux passages où la voix mélodique est accompagnée d’autres voix contrapuntiques. L’ambassadeur de ces morceaux est le pianiste Glenn Gould qui joua ces variations comme nul autre, parfois de façon quasi-mystique.
Je suis sûr que cette Aria ne vous est pas inconnue !
PS : ne pas reproduire cette position au piano, en aucune façon adaptée si vous débutez, et même si vous êtes plus confirmé 😉
Des pièces de Beethoven, Chopin, ou Debussy
Ces trois maîtres ont aussi mis en valeur les possibilités polyphoniques du piano, chacun à son époque et selon son style.
Beethoven – Sonate n°13, Op. 27, Finale
Le final de la sonate n°13 est énergique et fait apparaître plusieurs plans sonores. C’est magistral. Je vous recommande l’écoute de la sonate dans son intégralité et du magnifique Adagio, le 3ème mouvement (dont le final fait d’ailleurs le rappel).
Chopin – Étude Op. 25 n° 7 en Ut dièse mineur
Une composition marquée du sceau romantique, avec une polyphonie expressive et chantante.
Debussy – Arabesque n°1
Un autre chef d’oeuvre ! La première arabesque est une des premières oeuvres majeures de Claude Debussy. Ici, les voix s’entrecroisent avec des lignes mélodiques fluides et élégantes. Les sons révèlent des harmonies impressionnistes typiques du style de Debussy.
Liszt, l’homme orchestre
Les transcriptions de Liszt de morceaux d’orchestre sont des exemples remarquables des possibilités qu’offre le piano en matière de polyphonie (avec quelques limites bien entendues, dans le volume sonore ou les textures qui sont propres à chaque instrument).
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Berlioz / Liszt – Symphonie Fantastique
La transcription pour piano de la « Symphonie Fantastique » de Berlioz par Liszt est très fidèle à l’original et montre les capacités du piano à reproduire des couleurs orchestrales.
Allez, une transcription de plus et pas des moindres, celle de la symphonie n°9 de Beethoven. Et oui, Liszt a transcrit pour le piano l’ensemble des symphonies de Beethoven ! On imagine mal le travail titanesque, presque surhumain, derrière une telle entreprise.
Beethoven / Liszt – Symphonie n°9
Le premier commentaire attaché à cette vidéo rend compte de la démesure : une symphonie légendaire composée par un compositeur légendaire transcrite par un pianiste légendaire, et nécessitant l’exécution d’un pianiste légendaire !
Les possibilités du piano de nos jours
Plus proche de nous, régalons-nous avec ces trois morceaux.
Mad rush de Philipp Glass est une composition dite minimaliste.
Sa structure repose sur la répétition et la transformation de motifs, tantôt calme, tantôt plus intense voir frénétique. La polyphonie y est présente avec des lignes mélodiques et rythmiques qui s’entrecroisent, ce qui crée l’impression d’un mouvement perpétuel et qui évolue progressivement.
Un peu moins connu, je vous propose cette chanson de Larissa (Larissa’s song) de Martin Stock.
Ce morceau illustre tout simplement la superposition d’une belle mélodie, très douce, dans les aigus, et de son accompagnement épuré, apportant une juste épaisseur sonore, dans les basses.
Et pour finir, écoutons le thème de la BO de Nausicaa, un des premiers animes de Miyazaki.
Vous savez que j’apprécie particulièrement ces oeuvres, cinéma, comme musique.
Ce morceau, son ambiance, sa mélodie sont purement des vecteurs d’émotions !
Et voilà, notre voyage au piano et de ses possibilités polyphoniques s’arrête ici.
Je ne vous cache pas que je vous ai présenté dans cette sélection quelques-uns de mes morceaux coups de coeur.
Il y aurait bien sûr des dizaines d’autres pièces et compositeurs connus pour montrer davantage des capacités et de la beauté du piano, jouant dans plusieurs registres.
Du baroque à nos jours, tous les compositeurs et morceaux mis en avant ici ont à leur manière contribué à une approche un peu différente du piano.
A travers les époques, le piano est ainsi devenu un véritable laboratoire sonore pour lequel la polyphonie a contribué grandement à l’évolution même des styles pianistiques.
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1 morceau facile, avec des conseils détaillés en vidéo : le 1er prélude de Bach.
6 commentaires
Les différentes sonorités, intensités et sensibilités des partitions sont impressionnante. Je crois que plusieurs années sont requises pour les doigts pour jouer comme cela. J’ai encore beaucoup à apprendre au piano ☕️
Merci pour le message Noella. Ces vidéos sont en effet très inspirantes, mais sont aussi jouées par des professionnels ou maîtres. Un entraînement régulier et l’expérience permettent néanmoins d’envisager quelques-unes de ces partitions (la 1ère arabesque, l’aria…).
Merci, Benoît, pour cet article bien illustré et très intéressant!
Merci Marie Alix.
Bonne lecture et écoute !
Merci beaucoup ! c ‘est tout un univers à découvrir. je vais prendre le temps pour apprécier vraiment.
Merci Marie.
Bonne découverte !